Le métolachlore-ESA contamine 100 % des cours d’eau bretons testés.
Les herbicides à base de S-métolachlore sont interdits à la vente depuis le 20 octobre. Leur utilisation reste toutefois autorisée pendant encore un an. La Bretagne est la région la plus contaminée. Tous les cours d’eau analysés en 2021 présentaient au moins un prélèvement dépassant le seuil de 0,1 µg/l du métolachlore-ESA, l’une des principales molécules persistantes issues de la dégradation du S-métolacachlore-ESA.
Il était commercialisé sous les marques Camix, Deflexo S, Dual Gold Safeneur ou S-Metolastar Safeneur. Le S-métolachlore, un pesticide susceptible de provoquer des cancers, est interdit à la vente en France depuis le 20 octobre 2023 pour la plupart de ses usages. Les agriculteurs peuvent toutefois vider leur stock pendant un an pour désherber les champs de maïs, tournesols, soja ou de sorghos. Il reste autorisé pour les betteraves.L’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation de l’environnement et du travail (Anses) justifie cette procédure de retrait par le souci de préserver la qualité des ressources hydriques. « L’évaluation du risque de transfert aux eaux souterraines des métabolites du S-métolachlore montre des concentrations inacceptables », concluait-elle dans un avis publié le 15 février.« En réalité, l’alerte date de la première autorisation de mise sur le marché par l’Europe en 2005, pointe Dominique Le Goux, chargée de mission santé-environnement pour Eau et rivières de Bretagne. On pourrait considérer que la France n’a pas mis les mesures de restriction nécessaires quand elle a autorisé l’usage du S-métolachlore. »Un herbicide utilisé pour le maïs en BretagneCar le mal est fait. En moins de 20 ans, les métabolites du S-métolachlore, ces molécules issues de la dégradation de la substance active, se sont largement répandues dans les eaux souterraines et superficielles du pays. La Bretagne détient un triste record en la matière. Au cours de l’année 2021, le seuil de 0,1 µg/l de métolachlore-ESA (un des métabolites du S-métolachlore) a été dépassé au moins une fois dans quasiment tous les cours d’eau disposant d’une station de mesure dans la région. En progression sur un an.La carte réalisée la société Akwari Coop, que nous publions en exclusivité, révèle une grande disparité géographique. Le grand Ouest présente des concentrations importantes en raison de l’utilisation du S-métolachlore sur les cultures de maïs, qui nourrissent le bétail. La Bretagne est, de loin, la première région d’élevage de France. Dans le Sud-Ouest s’ajoute la culture du tournesol et du soja.Le tribunal administratif de Rennes a pourtant rejeté en juin une requête de l’association Eau et rivières de Bretagne qui cherchait à faire interdire l’usage du S-métolachlore dans la région. Les juges ne trouvant pas dans les arguments présentés par l’association la preuve d’un risque exceptionnel propre au territoire breton. Eau et rivières de Bretagne a aussi introduit un recours au Conseil d’Etat, qui n’a pas encore été étudié.Mi-octobre, les États membres de l’Union européenne ont acté le non-renouvellement de six substances actives dont le S-métolachlore. À l’échelle communautaire, l’autorisation prendra fin le 15 novembre 2024. La décision a été saluée par Générations Futures mais dénoncée par l’Association générale des producteurs de maïs. |
40 %part de la population bretonne concernée, en 2021, par un dépassement ponctuel ou confirmé du « seuil de qualité » pour le métolachlore-ESA, alors fixé à 0,1 µg/l (ARS Bretagne). |
« Le ministre de l’Agriculture n’aurait pas dû faire d’ingérence en contestant la mesure de retrait des principaux usages du S-métolachlore annoncée par l’Anses en février » Dominique Le Goux, chargée de mission santé-environnement pour Eau et rivières de Bretagne. |